Rédaction Jeanne Valois, juillet 2017
Rébénacq aux XV-XVIIIe siècles
Durant les siècles qui suivent la fondation de Rébénacq, certaines familles installent leur habitation au milieu de leurs terres. L’extension du bourg s’effectue, sans doute progressivement, vers le sud-est (chemin de Couloumat) et le long des rives du Néez (quartier de la Garenne et route de Bosdarros), le territoire étant limité à l’ouest par le Néez et au nord-est par une propriété seigneuriale.
La propriété seigneuriale
Une maison noble ‘de Peyre’ est documentée dans un acte de 1538. Rien ne permet actuellement de connaître l’origine de cette seigneurie locale ni son lien éventuel avec la bastide. La charte de 1347 précise que le seigneur de Bescat, Pierre, était abbé laïque de Bescat (entre autres il y gérait la dîme de l’église) : pour avoir cédé la moitié de son territoire, avait-il reçu lors de cette fondation des compensations de la part de Gaston Fébus ? Quelques indices textuels tardifs (XVIIIe) mentionnent une abbaye laïque à Rébénacq, mais doivent être interprétés avec une très grande prudence.
Apportée en dot par Jeanne de Bescat (héritière) lors de son mariage en 1571 avec Jacques d’Arros, la seigneurie est ensuite plusieurs fois revendue, toujours dans la parentèle. A compter de 1613, le seigneur de Rébénacq est admis à siéger aux Etats de Béarn. En 1621, elle acquise par Daniel Labarthe, déjà en possession d’autres seigneuries qu’il revend. Il fait ériger celle de Rébénacq en baronnie en 1632. Son fils Arnaud obtient à son tour le statut de vicomte en 1652. La petite-nièce de ce dernier, qu’il institue héritière, épouse en 1672 François de Pas de Feuquières, dont la mère est une Gramont. Il occupe un poste d’ambassadeur sous Louis XIV et fait ériger la seigneurie en comté en 1691. Son aînée Charlotte-Catherine se marie avec un fils de Louvois en 1698.
L’ascension sociale a donc permis à la famille Labarthe, issue d’un milieu marchand béarnais, d’acquérir un statut de petite noblesse puis par suite de mariages d’être introduite à la Cour de Versailles.
En 1789, la seigneurie est aux mains de leur descendant, le marquis Amans de Saint-Chamans. Au moment de la Révolution, il s’exile en Angleterre. Il est déclaré émigré : en 1794 sa propriété est saisie, morcelée et vendue comme Biens Nationaux. Le château est acquis par un maître maçon local, qui le démantèle complètement. Un édit communal enjoint aux habitants de montrer leur solidarité avec le mouvement révolutionnaire en incorporant un élément de ce château à leur maison, ce qui explique certaines incongruïtés répérables sur les façades.
Le nom de plusieurs chemins ruraux rappelle de nos jours cette ancienne propriété : chemins « du casteit » de « las bignes » (vignoble seigneurial).
Les moulins seigneuriaux
La charte de fondation de 1347 prévoyait la construction d’un moulin à farine et d’un foulon (pour le feutrage de la laine). Le torrent qui longe la commune, le Néez, est issu d’une résurgence du Gave d’Ossau, il fournit donc de manière régulière la force motrice nécessaire pour actionner les roues. Toutefois la date exacte d’édification des moulins n’est pas connue, ni leur mode d’exploitation. Plus tardivement vers 1690, un moulin à papier est construit (à l’emplacement de l’actuel fronton route de Laruns).
Ces trois moulins sont alors propriété seigneuriale et affermés à des meuniers ou à une lignée de maîtres-papetiers, les Raguette.
Voirie
Entre 1760 et 1763, l’intendant royal de la généralité de Pau, Antoine Mégret d’Étigny, engage l’établissement de nouvelles voies de communication. Il décide de la route actuelle dans le vallon du Néez pour joindre Pau aux Eaux-Chaudes et aux Eaux-Bonnes (deux stations thermales situées en haute vallée d’Ossau). Jusque là, le trajet de Gan à Rébénacq imposait de passer par Bosdarros (et donc par les collines).
Un axe est-ouest reliait Nay à Oloron. D’Etigny en fait modifier le parcours dans Rébénacq ; les travaux sont achevés vers 1785, une vingtaine d’année après sa mort. Elle est un exemple des routes tracées selon l’art pratiqué au XVIIIe siècle, où l’on recommande des voies plus larges et plus droites : elle a ainsi dû empiéter sur les terres seigneuriales. L’ancienne route devient le « cami bielh » (le chemin vieux). Pour franchir le Néez à l’intersection de ces deux routes, il n’existe encore en 1786 qu’un pont « pour les gens à pied, aucun pour les voitures, faute de ressources dans la province ». Celui en pierre a donc été construit plus tard.
Le croisement de ces nouvelles routes s’effectue place de la mairie : elle devient peu à peu le centre actif du village, où se multiplient auberges et s’installent deux forgerons
La place de la Bielle est laissée à l’écart, s’y retrouvent les artisans (tisserands de laine ou de lin, sabotiers, cordonniers, etc), même si quelques commerces y perdurent jusque dans l’entre-deux guerres.